POINT DE VUEPOLITIQUE

ATT, L’ABSENT LE PLUS PRESENT : Un héritage à fructifier et à consolider…

10 Novembre 2020-10 novembre 2023 ! Il était une fois ATT, le soldat de la démocratie et le temps de l’héritage politique à porter, 3 ans après.

Le 17 juin 2000, en lançant l’« Appel pour la candidature de ATT » à l’élection présidentielle de 2002 depuis le Sénégal, le Groupe de Dakar avait accompagné cette déclaration d’un texte publié alors sur le site www.att2002.net et intitulé « Le Soldat de la démocratie ».

Ce document a fait recette dans tous les sens du terme, au propre comme au figuré, parce qu’il correspondait en réalité aux dimensions politiques et sociales de l’homme.

Le Mouvement Citoyen a porté ladite candidature en 2002. ATT fût dix ans plus tôt de l’avis unanime des observateurs, celui qui aura dirigé la transition démocratique la moins conflictuelle et la plus réussie en Afrique en particulier au Mali.

Dans ses confidences à un journal panafricain le Général ATT expliquait déjà en 1992, les raisons de son départ du pouvoir après la Transition en ces termes : « … si j’étais resté, j’aurais triché. Si je m’étais présenté aux premières élections, j’aurais faussé le jeu. » Cette prise de position sur l’arbitre d’une transition révèle chez lui, selon la presse internationale qui le comparait à Nelson Mandela, une profonde conviction démocratique.

Candidat à un second mandat en 2007, sa candidature était portée par l’Alliance pour la démocratie et le progrès (ADP) et le Mouvement Citoyen. Celle-ci était composée au départ de 14 partis politiques : l’Adéma-Pasj ; le Bdia ; le CNID ; le Miria ; le MPR ; le PCR ; le PDR ; le PIDS ; le PDP ; le RND ; l’UDD ; l’UMP ; l’URD et l’Us-Rda.

Plus tard, 19 partis autres ont rejoint l’Alliance : ADES, AMAT, ANC, CNDR, FAMA, PDP, PUDP, RAMAT, UDF, PDJ, LJS, PLM, TDS, FSP, PDCI, MDD, PMPS, PARISA et PECSAM.

Ce qui pourrait faire sourire certains aujourd’hui, au cours de cette campagne, le candidat ATT avait comme porte-parole : Dr Choguel Kokala Maiga (MPR), Me Mountaga Tall (CNID), M. Souleymane KONE (Mouvement Citoyen et Président de la Commission Maliens de l’Extérieur), Prof. Tièmoko Sangaré (ADEMA-PASJ).

On s’attendait à ce que l’élection de ATT, sonne le retour du peuple malien dans la politique tellement le champ électoral avait été boudé par les citoyens depuis la naissance de la démocratie.

Les associations et le mouvement social que d’aucuns avaient voulu en exclurent étaient largement présentes, aux côtés du Mouvement Citoyen, dans cette campagne et y ont largement contribué à la victoire du candidat ATT.

Le Combat de Amadou Toumani Touré pour la démocratie a une histoire. Au temps fort de la dictature du parti unique, ATT fût, en raison de ses convictions patriotiques et démocratiques, parmi les rares officiers de l’armée à « se tenir sur le pas de la porte alors que nombre de ses compagnons d’armes goûtaient aux délices d’un pouvoir corrompu ».

Responsable du camp para, il a vu passer presque tous les grands détenus politiques de l’époque dans ses services mais avec cette note significative, qu’il a personnellement tout fait pour faire respecter leur dignité d’homme.

Il a été incontestablement à la base de la naissance dans les années 80, de ce qu’on peut appeler un mouvement démocratique au sein de l’armée. Un mouvement qui cherchait alors une adhésion populaire à tout projet de changement politique dans le pays.

C’est le Mouvement démocratique de 1990 à 1991 qui a favorisé les conditions de maturation de cette adhésion populaire au changement intervenu le 26 Mars 1991.

Pour un témoignage à titre indicatif, lorsqu’en 1986, je fus invité par le capitaine Thomas Sankara à l’occasion des festivités du 4 Aout, date anniversaire de la révolution du Burkina Faso, j’étais porteur d’un message du Professeur Ibrahima Ly demandant au capitaine d’aider la révolution malienne à s’organiser.

Après une longue discussion, le Président du Faso me fit comprendre sans détour, qu’il ne pouvait pas nous aider, parce que nous étions faibles et très divisés.

Mais, il me confia qu’il y a deux officiers qui portent le destin révolutionnaire du Mali. Il me donna les noms de Lamine Diabira et de Amadou Toumani Touré en précisant que ce dernier était un béret rouge comme lui-même.

Aujourd’hui, il convient non seulement de restituer à ATT son statut historique de rassembleur et d’homme de paix, mais également de fructifier et surtout de consolider son héritage fait de patriotisme.

En effet, ce titre lui revient de droit dans l’histoire politique de notre pays. On doit aussi lui attribuer l’esprit du 26 mars qu’il incarne plus que tout autre acteur dans la classe politique.

Certes, le combat pour l’instauration de la démocratie a été l’œuvre de la convergence de tous les efforts de 23 ans, qui ont abouti au changement intervenu le 26 mars 1991, mais il y a pris une place déterminante.

La classe politique dans ses différentes composantes lui reconnaissait d’ailleurs ce rôle. C’est pourquoi elle avait, de façon unanime, proposé ATT comme médiateur lors de la crise grave politique née des élections générales de 1997.

Dès son retour au pouvoir en juin 2002, il instaura le consensus politique comme modèle de gestion partagée du pouvoir. Il s’agissait là de promouvoir la gestion solidaire des grands problèmes de la Nation.

En fait, s’il y a un trait spécifique dans la démarche politique de ATT c’est bien la recherche du consensus. Celle-ci apparaît comme ce qu’il y a de plus constant dans sa gestion du pouvoir, depuis la transition démocratique de 1991.

Le concentré de cette démarche se trouvait dans son slogan de campagne de 2002: « Retrouvons ce qui nous unit ». C’est un fait que ce modèle de la démocratie consensuelle avait pris les contours de la touche ATT, mais le consensus est l’essence même de la culture traditionnelle politique dans la société de notre pays.

Ce trait de notre vie politique mérite d’être valorisé à présent par tous ceux qui ont à cœur la stabilité du pays. Ce qui impose de notre part la volonté d’entreprendre des démarches appropriées en vue de la Construction d’une convergence citoyenne autour des questions majeures de la Nation.

En effet, investis dans des partis politiques, des associations, des collectifs, des organisations politiques ou syndicales, nos itinéraires et nos combats sont certes divers, mais ils ont été et devront rester davantage convergents par les valeurs empreintes de solidarité et les espoirs que portent la vision et les ambitions pour un Mali rassemblé et mobilisé pour la paix et la solidarité.

Car notre adversaire commun aujourd’hui, ce sont les velléités de domination de l’extérieur, c’est aussi et surtout le laxisme, la corruption, le chômage des jeunes, l’instabilité politique et sociale, les agressions contre les droits des femmes et des enfants, contre notre environnement malsain et nos cultures d’indiscipline etc. En somme, ce sont toutes les formes d’exclusion dont sont victimes les femmes et les hommes de notre pays.

Par les œuvres sociales de la Fondation pour l’Enfance qui porte admirablement son nom aujourd’hui, ATT a cherché à toutes les étapes de sa vie politique à lutter contre l’exclusion.

Depuis plusieurs années dans notre pays, des femmes et des hommes de plus en plus nombreux, portent avec force l’espoir, l’urgence et la possibilité d’un autre Mali. Ensemble, à travers les combats individuels et/ou collectifs et les réflexions, à travers les solidarités que nous tissons, que nous dessinons dans la diversité des pratiques citoyennes, nous devrons travailler pour libérer notre société de ses tares.

Mais, la force sociale et politique en mesure de mener au bout les initiatives populaires et d’arracher de nouvelles conquêtes et de nouveaux droits reste à construire. Elle est celle qui doit refuser l’enfermement des citoyens dans des clichés. Il nous faut véritablement reconstruire et transformer notre classe politique pour changer notre société.

C’est à cette construction qui tenait à cœur ATT, que nous voulons travailler ensemble. Pour cela, il nous faut rassembler des forces, des engagements, des expériences aujourd’hui dispersés. Cela est possible autour des projets partagés qui auront pour objectif d’assurer à chacun le droit à une existence digne, l’exercice démocratique du pouvoir, l’égalité des droits et des chances.

Pour ce faire, il nous faut surmonter la coupure paralysante entre ce qu’il est convenu d’appeler le mouvement social et la politique et renouveler les formes et les objectifs des forces de transformation sociales et politiques.

C’est de cette mobilisation démocratique permanente, du partage des expériences les plus diverses que dépendent la force et la pertinence du projet d’alternative que constituait le message du consensus politique de ATT.

S Koné

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