Crise socio-politique au Mali : désormais des coups d’Etat comme solution à la mauvaise gouvernance !
En effet, que vaut réellement la disposition de l’alinéa 2 de l’article 121 de la Constituions de la République du Mali du 25 février 1992 dont la teneur suit : « … Tout coup d’Etat ou putsch est un crime imprescriptible contre le peuple malien ».
Faut-il le rappeler si besoin en était, tous les présidents maliens ont été victimes de coup d’Etat excepté Alpha Oumar KONARE (1992-2002). Le mardi 18 août 2020, l’histoire s’est répétée à nouveau pour le Mali avec le renversement du Président Ibrahim Boubacar KEITA et l’ensemble de son régime par des jeunes colonels, Assimi GOITA, Malick DIAW, Sadio CAMARA et Ismael WAGUE, entre autres.
Nul n’ignorait la profondeur de la crise dans laquelle le pays est plongé, avec à la clé des grèves dans presque tous les secteurs socio-économiques du pays et dont il fallait chercher un dénouement rapide. C’est pourquoi ces jeunes officiers supérieurs ont décidé de prendre leur responsabilité pour sortir le Mali de la crise socio-politique qui n’avait que trop duré, d’où toute la ferveur populaire autour de l’acte.
Mais pour autant, une question s’impose : faut-il désormais légaliser les coups de force comme solution à la mal gouvernance, aux différentes crises ? il semble que oui, au regard de la presque unanimité autour de cet énième coup d’Etat. En effet, les réactions enthousiastes des forces vives, notamment la classe politique aussi bien dans l’opposition que dans la majorité, avec des condamnations de façade. Le Président du RPM, Dr Bocary TRETA, condamne du bout des lèvres, avant de déclarer que le discours prononcé par la junte encourage à la réflexion pour une perspective de sortie de crise et que son parti est « totalement disponible » pour travailler avec les putschistes. Quant au Président du Conseil National de la Société civile, Bourehima Allaye TOURE, il déclare avoir noté avec satisfaction la main tendue de nouveaux acteurs après une condamnation symbolique. L’éminent avocat, Me Mountaga TALL, a choisi de nier tout simplement le coup d’Etat. Certains responsables du M5-RFP s’en sont réjouis, estimant que c’est un parachèvement de leur lutte. Le Président du parti Yelema, Moussa MARA est affirmatif quant à la nécessité pour l’ensemble des forces vives de travailler avec les militaires. Seul l’ADEMA-PASJ a fait un peu mieux, en condamnant avec fermeté et en exigeant le rétablissement de l’ordre constitutionnel mais aussi et surtout son communiqué n’a pas fait mention de la disponibilité du parti à travailler avec les militaires putschistes.
Pour sa part, la communauté internationale a dans un premier temps, condamné avec vigueur en exigeant le rétablissement du régime déchu, avant de prendre fait et cause pour la réalité des faits.
En clair, l’esprit de l’alinéa 2 de l’article 121 est de rejeter en bloc et de façon irréversible tout coup d’Etat ou putsch et le cas échéant, mettre tout en œuvre pour le retour aux affaires du président déchu. Les maliens doivent arrêter de justifier les coups d’Etat par des prétextes de mal gouvernance, d’incompétence ou toute autre infraction à la gouvernance ou à la démocratie. S’il est vrai qu’une lutte implacable doit être menée contre l’impunité et les maux qui minent la gouvernance, ces coups de forces à répétition représentent un danger réel pour la démocratie et la stabilité au Mali, car toutes les fois qu’un groupuscule de militaires estime que l’occasion est propice, il se lèvera pour renverser le régime en place au prétexte de la mal gouvernance et, bonjour l’instabilité chronique, que dieu nous en garde, pauvre Mali.
MD