SCIENCE & TECH

La francophonie et les pratiques du numérique font-elles bon ménage ?

Le français souffre de plusieurs amalgames dans les zones francophones et plus particulièrement au Mali à cause, notamment de l’utilisation incontrôlée et anarchique des technologies de l’Information et de la communication. Avec celles-ci, l’homme se fait voir de plus en plus pressé et se permet d’utiliser les mots comme bon lui semble. Des règles fondamentales sont violées sciemment. Ces pratiques ne permettent pas l’éclosion d’une bonne francophonie. Il faudrait alors changer de fusils d’épaule.

Si la francophonie se comprend comme une communauté d’individus se servant du français comme langue de véhicule à travers l’usage des différentes formes d’expression : verbale ou écrite, il y a lieu de se demander en ce 21e  siècle,  face à certaines pratiques auxquelles s’adonnent de plus en plus les jeunes à travers des outils numériques ou sur des plateformes numériques l’avenir que nous réservons à la francophonie. Une bonne expression en français demande l’usage correct des mots et expressions. Mais nous remarquons de plus en plus, soit par méconnaissance ou par paresse,  des utilisations abusives des mots à l’écrit notamment dans les SMS téléphoniques ou entre correspondants sur les réseaux sociaux. Les bonnes règles sont volontairement violées. L’abréviation se fait de façon anarchique et rendant ainsi l’intercompréhension difficile. C’est pourquoi dans le rapport sur l’état de la francophonie numérique en 2018 il est souligné : « La rapidité, l’ampleur et la portée des changements induits par le numérique ont un impact de plus en plus important sur les modèles politiques, économiques, sociaux et culturels traditionnels.»

Outre cela, l’autre problème est que les enfants qui s’adonnent à ces pratiques sont des gens qui n’attendent nullement acquérir suffisamment d’expériences en français avant de s’y livrer. Du coup, à force d’utiliser les mauvaises techniques, ils finissent par les considérer comme étant les bonnes manières.

Si la francophonie souffre en ce 21e siècle, c’est parce que l’homme s’est laissé devenir l’esclave du numérique. Rares sont ceux qui se livrent au travail ardu de  recherche afin de se performer.  Le pire dans cette situation est que ceux qui sont censés montrer la bonne voie, les éducateurs, sont pour la plupart égarés pour les mêmes raisons. Permettez-nous d’amener cette définition des Lumières d’Emmanuel Kant afin de faire le rapprochement avec la situation actuelle de la Francophonie à l’ère de l’explosion du numérique : « Les lumières, dit Kant, c’est la sortie de l’homme de sa minorité. Minorité dont il est lui-même responsable, car le problème ne réside pas dans un défaut d’entendement, mais dans un manque de courage de s’en servir sans la direction d’autrui. »

En effet, cette crise dans la francophonie reste tributaire aux comportements irresponsables des hommes ayant accepté de devenir des esclaves des outils du développement technologique. Cette crise n’est alors pas une question de compétence, mais plutôt d’indifférence ou de paresse à fournir suffisamment d’efforts pour le règne d’une véritable francophonie.

Pour éviter que les pays africains de la zone francophone ne sortent pas perdant après avoir perdu leurs langues nationales au profit du français, il leur incombe de revoir leur rapport à cette langue. Pour ce faire, nul besoin de vouloir se priver des fruits du développement technologique, mais il s’agirait plutôt de les utiliser de façon plus judicieuse en cherchant à mieux comprendre les règles de l’abréviation, en multipliant la lecture  pour enrichir le vocabulaire, en s’exprimant pour les autres et non pas pour nous-mêmes. À ce titre, le numérique,  au lieu d’occuper la première position,  sera voué au second plan. Il dépendra de l’homme et non celui-ci de lui. Dans le rapport 2016 sur la Francophonie, nous pouvions lire  ces éloges sur le numérique : « Il est devenu une évidence pour tous que la révolution et les évolutions numériques touchent tous les secteurs de l’activité humaine et que l’appropriation des tech­nologies constitue un enjeu de première importance pour la jeunesse et la réali­sation des objectifs du développement durable. Dans ce contexte, il convient de réaffirmer la force mobilisatrice des valeurs humanistes portées par l’OIF depuis sa création en 1970, sous l’impulsion des pères fondateurs, Léopold Sédar Senghor et ses homologues tunisien, Habib Bourguiba, et nigérien, Hamani Diori, ainsi que le prince Norodom Sihanouk du Cambodge. » Alors, il s’agit juste pour nous de mieux contrôler l’explosion du numérique pour qu’elle n’étouffe simplement et complètement la francophonie.

Fousseni TOGOLA

Source : www.lepays.ml

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