L’Autre Guerre
L’écran de fumée de la gestion du conflit au centre du Mali n’est-il pas un leurre ? Au fil des différentes présentations des journaux, l’on voit des signatures d’accords, mais l’on n’entrevoie aucune amélioration, aucun changement qualitatif. Ces accords ne transforment guère la société à l’aune des véritables attentes des populations. Des Maliens sont tués, braqués, dépouillés de leurs biens. L’on se demande où est notre armée, où est l’État.
Raison pour laquelle, certains, poussés par leur instinct de survie, ont érigé un cordon sanitaire entre eux et l’État en créant leur mouvement d’autodéfense. Chose normale. Notre État est devenu la proie de multiples groupes de pression. À qui la faute ? Certaines situations inclinent à penser que l’Etat vacille, se soustrait à ses responsabilités, ses prérogatives régaliennes. Le florilège de promesses est-il déjà tombé dans les oubliettes ?
En réalité, les actions de l’État pour protéger son peuple, assurer le bien-être de son peuple ne doivent pas être de circonstance, mais permanentes. Est-ce le cas chez nous ?
Depuis un certain temps, la guerre se transpose et se propage au centre à telle enseigne que le nord semble être oublié. Ce déplacement de la guerre vers le centre n’est qu’une diversion, une voie de détournement des attentions des Maliens. Au fond, le conflit n’est en rien un conflit ethnique, religieux. Les causes sont politiques et de surcroît économiques. Le conflit est politique et la solution ne peut être que politique. Dogons, Peuls, tous sont innocents dans cette situation de conflit. Les Peuls sont visés par l’ennemi extérieur pour deux raisons : primo, les Peuls cohabitent avec toutes les autres communautés, secundo, le Peul est un homme qui ne supporte pas l’humiliation et n’abandonne jamais. L’ennemi a profité de leur simplicité, leur sens élevé d’hospitalité, de leur passivité. Toutes ces tueries fratricides, ces attaques se passent aux yeux et à la barbe de cette nation qui se dit ami du Mali, cette nation qui se dit grand défenseur des droits de l’homme, oui cette nation mendiant larmoyant sans le Mali, sans l’Afrique : la France. Ne serait-elle pas à la base de tous nos maux ?
Si nous sommes dans cette situation de merdes aujourd’hui, c’est que quelque part, les petits conflits d’antan ont été négligés ou mal gérés par l’État, c’est que quelque part certains ont été traités injustement, c’est que certains ont été impatients. L’impatience tue. Il y aurait à la base une main invisible, à chacun de voir. Sinon, comment se fait-il que des gens qui cohabitent il y a des centaines d’années puissent prendre les armes les uns contre les autres ?
L’objectif de l’ennemi extérieur n’est pas seulement le centre, mais tout le Mali afin de pouvoir bien nous exploiter encore, exploiter nos ressources qui nous reviennent de droit. Le Mali n’est pas le seul pays que l’ennemi extérieur vise, si les précautions ne sont pas prises, la même chose se passera au Burkina et dans d’autres pays voisins.
Ce qui est possible pour une sortie de crise serait la concertation directe entre Maliens sur le terrain avec la présence de l’État, les acteurs de la société civile, les bons leaders religieux. Il faudra plus de pragmatisme, car nombreuses sont ces personnes victimes du conflit qui ont besoin de soutien, d’accompagnement. Il ne s’agit pas que de soutien matériel, mais surtout un soutien moral, psychologique. En plus de cela, il est temps que l’État malien revienne au Mali, écoute les Maliens et serve les Maliens. Le Mali de Modibo Keita, ce grand panafricain. Ce que certains ne savent pas, c’est que l’histoire est cyclique, la colonisation a été dominante un moment donné par la présence de l’armée française sur notre terre. Aujourd’hui elle revient sous une autre forme par la présence des militaires français au nord de notre pays. Il faut donc renvoyer ces militaires chez eux sinon rien ne s’arrangerait. Il faut une union sous régional pour contre carrer toutes les attaques terroristes.
À tous les Dogons, Peuls et tous les Maliens, il nous faut un bon discernement pour ne pas être victimes de nous-mêmes, de nos passions et nos émotions. Nous sommes Maliens avant tout, et heurter les uns les autres ne sert à rien, l’on ne peut rien construire dans la bagarre. À chacun d’apporter sa pierre à l’édification du Mali nouveau, uni et prospère.
Laxi Jonas Koné, étudiant
Source : www.lepays.ml