Le Triangle de Feu
Scientifiquement, l’on obtient le feu à partir de la combinaison de trois éléments à savoir :
- le combustible ;
- le comburant ;
- l’énergie d’activation.
Eclairé donc, qui comprendra que les deux premiers éléments sont d’ores et déjà réunis dans les laboratoires d’idées conçus et savamment entretenus au service de l’expansionnisme, cette vielle terminologie que l’on ne retrouve plus dans aucun bouquin, bon vous m’excuserez car je suis ringard mdr. Ces laboratoires qui, à mille lieux d’Ogossagou et de Sobane da produisent entre autres sous les auspices du diable, les traits maléfiques d’un destin ô combien tragique que l’on octroi par la suite aux citoyens des Etats cibles comme nos compatriotes des villages susmentionnés. (Comprendra qui pourra).
Ô que le diable est habile ! Plutôt ô pauvre Mali. Dis-moi, d’où vient ton malheur ?
Le combustible (facteur extérieur)
Tripoli, disons tout simplement la Libye. Ce pays qui jadis nous rappelait une génération de maliens en quête d’un mieux-être, des maliens qui s’y rendaient dans l’espoir de trouver du travail, semble être la source de tous tes malheurs. Mais que l’on se comprenne bien, ça n’est pas tout noir ou tout blanc autrement dit, ça n’est pas aussi simple alors expliquons-nous.
Quand il a été décidé de redéfinir les rapports de force en Libye en 2011 (cela est fréquent dans les relations internationales) dans le but de permettre un positionnement ou un repositionnement géostratégique, une puissance étrangère qui a semblé prendre le lead de cette campagne militaire a élaboré un plan de déstabilisation de ce pays en au moins trois temps :
- susciter une insurrection armée contre le pouvoir en place (ça c’est classique) ;
- affaiblir à priori le dispositif de défense libyen (débauchage de militaires, sabotages etc.) ;
- intervenir militairement en appui aux insurgés.
Pour faire court, disons que le plan a fonctionné sauf que les militaires débauchés des rangs de l’armée régulière libyenne avaient des origines maliennes (pour un grand nombre d’entre eux), leur recyclage n’est donc qu’une balade de santé d’une pierre, on en fait deux coups en plus ça ne coûte pas cher.
Ainsi, du haut de ses expériences en matière de politiques coloniales, l’endoctrinement de ceux qui étaient alors les futurs ‘’rebelles du nord du Mali’’ n’a été que du gâteau comme on l’entend souvent dans les films de gangsters produits à Hollywood (mdr). La suite vous la connaissez, il y a eu d’abord Aguel hoc où des soldats maliens ont été ligotés et égorgés sans aucun émoi dans la société internationale, j’allais dire communauté internationale. Le plan suit son cours.
Le comburant (facteur domestique)
Où chercher encore le comburant quand l’on sait que le Mali était suffisamment fragile pour subir tout simplement les conséquences d’un si cynique projet. En effet, le Mali de 2012 avait quasiment tout d’un Etat failli, d’aucuns parlaient même de proto Etat. Les mécanismes institutionnels de gouvernance non fiables, la politique délégitimée, la corruption quasi systémique, la distribution de la justice se fait sur mesure, le niveau de redistribution des richesses nationales extrêmement bas, l’Administration publique inadaptée, une jeunesse sans conscience politique, des nationaux en panne de citoyenneté, des services publics de très basse qualité, une armée en mode veille, l’autorité de l’Etat permanemment défiée, bref l’Etat utile n’existait pas.
La situation globale du pays était telle qu’il était très mal préparé à une crise aussi profonde et complexe. Les 20 ans d’exercice démocratique nous avaient conduits au bouleversement de l’ordre des valeurs, aucun secteur de la vie nationale n’avait échappé à la mauvaise gouvernance.
Ainsi, les déserteurs qu’on a évoqués en sus, à qui l’on avait miroité la création d’un Etat où ils seraient les seuls maîtres à travers la partition du Mali, n’ont pas eu de mal à déclarer la guerre à l’Etat malien. Le deal fonctionnait, cette puissance étrangère qui leur avait conduits jusqu’au Mali n’a pas hésité à mettre à leur disposition l’ensemble des moyens dont elle disposait (gîte et couverts, medias d’Etat, billets de banque, réseau diplomatique, lobbying, expertise militaire etc.) le comburant aurait donc été ce que nous pouvons appeler l’échec de la Gouvernance au Mali.
Quid de l’Energie d’activation ?
C’est le dernier élément du triangle. A l’analyse des récents événements (les massacres dans la région de Mopti), nous comprenons que les stratèges militaires semblent choisir cette fois ce que l’on appelle la politique de la terre brûlée. Elle n’est autre que la déstabilisation d’Etat, la subversion, la destruction massive à partir de l’intérieur car savez-vous la première stratégie (l’affrontement militaire directe entre les ‘’rebelles’’ et l’armée régulière malienne ou encore le state making war making) n’a vraiment pas marché, il faut donc revoir les copies.
Ainsi, il semble clair que c’est une guerre civile qui est recherchée cette fois en jouant sur l’ethnie et la religion (les scenarii rwandais et centrafricain)
Il s’agit concrètement d’engager des mercenaires, leur faire passer pour les milices d’une ethnie et leur faire commettre le summum des atrocités contre une autre ethnie. Ensuite, mettre en scène une vengeance à travers le même procédé. Cette stratégie vise à indigner au maximum l’opinion qui soit, croira à une guerre ethnique et dans ce cas plongera dans l’engrenage soit, se révoltera contre son gouvernement en entrainant la chute de celui-ci. Dans les deux cas il s’agit de déstabiliser l’Etat et mettre en œuvre certains agendas notamment obtenir l’indépendance de l’Azawad. Il faut dire que l’on tend à présent vers la création d’une zone tampon qui permettra de couper le sud du pays de sa partie nord en traçant les frontières de l’Azawad à partir des régions du centre.
En attendant qu’ils ne finissent de mettre au point l’énergie d’activation, nous en appelons donc au sens de sacrifice de tous à commencer par le Chef de l’Etat car quand ils l’auront mis au point, je ne souhaiterais pas être là pour vous narrer la suite.
Mamadou Lamine SIBY,
Analyste et homme politique
Source : LE PAYS