Mohamed Youssouf Bathily, sur la pandémie du coronavirus au Mali : « Cette gestion du covid-19 est indicatrice de l’incompétence, l’irresponsabilité et de l’inefficacité de Michel Hamala Sidibé »
Lundi 13 avril 2020, lors de sa traditionnelle sortie, le porte-parole du CDR (collectif pour la défense de la République), Mohamed Youssouf Bathily alias Ras Bath, s’est penché sur la problématique de la lutte contre le covid-19 dans notre pays. Il déplore le manque de coordination des actions, et tire la sonnette d’alarme.
Mohamed Youssouf Bathily a décidé de rompre avec le silence. Vu ce qui se passe dans le pays, surtout en matière de lutte contre le covid-19, le chroniqueur n’a pas hésité de cracher ses quatre vérités au ministre de la Santé et des Affaires sociales, Michel Hamala Sidibé. Ras Bath relaye que le Mali est confronté à des problèmes d’ambulances, de tenues de protection du personnel de santé, de masques, de gels… Il trouve que la façon de gérer le coronavirus pose problème dans le pays.
« Dans la lutte contre le covid-19, les pouvoirs sont partagés par le ministre Michel entre les services sanitaires. Ces services manquent de coordination. Ce qui fait que personne n’a le pouvoir de commander personne. Comment un tel système peut donner des bons résultats ? », se pose-t-il la question ? Il poursuit que le coronavirus peut se propager partout dans le pays. C’est pourquoi, dit-il, les mesures prises doivent être coordonnées par une seule personne cooptée pour diriger et surveiller l’équipe sanitaire de lutte contre le virus. Le chroniqueur tire la sonnette d’alarme et prévient que le système mis en place par Michel manque de bonne coordination pour la protection des personnes, voire l’enraiement du covid-19.
« En tant que société civile, nous avons saisi toutes les personnes que nous pouvions pour dire que le système adopté dans le cadre de la lutte contre le virus n’est pas bon. Avec ce système, personne n’est à l’abri du danger », confie Ras Bath. Aux États-Unis, dit-il, il y a certes du fédéralisme, mais le plan national de la lutte contre le coronavirus est quotidiennement dirigé par Donald Trump. Et le porte-parole de préciser : « Chaque jour, Donald Trump sort pour faire le point sur l’évolution du coronavirus. Il donne le bilan du nombre de personnes atteintes, les décès, et les difficultés auxquelles les États-Unis sont confrontés. Trump est le chef de la lutte contre le coronavirus qui s’est obligé de dire quotidiennement la vérité aux Américains. Au-delà de lui, les gouverneurs de New York, Washington, et les autres États américains donnent quotidiennement des informations aux citoyens. Ce n’est pas le ministre de la Santé qui donne des informations aux Américains, mais plutôt les gouverneurs qui coordonnent les choses. À la Maison-Blanche, ce n’est pas le secrétaire d’État à la Santé qui informe les citoyens, mais plutôt Donald Trump lui-même ».
Il prend l’exemple sur la France où les choses sont coordonnées par Emmanuel Macron, le Premier ministre et le directeur national de la Santé. Pareil pour la Chine dont le président coordonne le plan national de la lutte contre le virus.
Apparemment étonné des décisions du ministre, Mohamed Youssouf s’est posé cette question : Comment le même Michel qui a coordonné les actions de lutte contre le VIH SIDA à travers le monde peut, dans cette lutte contre le covid-19, poser des actes qui compliquent le combat anti coronavirus ? Ras Bath rappelle que les autorités du Mali ont nommé à travers un décret M. Akory Ag Iknane au poste de coordinateur national de la lutte contre la pandémie du covid-19. Le porte-parole se dit étonné de constater que M. Akory, coordinateur national de lutte contre le virus, n’a aucune compétence dans la gestion des matériels de travail du personnel médical : masques, combinaisons, gels, gants, tenues de protection, médicaments, produits pharmaceutiques, voire tous les outils indispensables dans l’enraiement du virus. Il souligne que la gestion des matériels a été confiée à la direction nationale des médicaments et des pharmacies par le ministre Michel.
« Les 20 000 matériels récemment octroyés au Mali par la Chine étaient stockés chez le coordinateur Akory. La semaine dernière, la direction nationale des médicaments et des pharmacies est allée récupérer lesdits matériels au motif que M. Akory est incompétent dans leur gestion. Comment peut-on obtenir de bons résultats dans ce contexte ? On se pose la question si c’est Michel qui avait réellement la charge de la lutte contre le SIDA sur le plan international ? Sinon, poursuit Ras Bath, il n’allait pas se permettre de nommer un coordinateur national de la lutte contre le covid-19 en lui dépouillant de ses prérogatives ».
Le chroniqueur déplore la manière dont le ministre organise la lutte contre la maladie pandémique, ce, à travers un système qui exige à ce que lorsque les médecins des Csrefs ou des hôpitaux ont besoin des équipements, adressent une demande au coordinateur Akory qui n’a aucun pouvoir de gérer les matériels. À son tour, celui-ci transmet le message au ministère de la Santé qui examine les demandes avant de faire passer l’information à la direction nationale des médicaments et des pharmacies. Ce, pour le déblocage des matériels. Pour Bath, les difficultés existant dans la structuration et la coordination « font tuer » les personnes atteintes du covid-19 avant le déblocage des matériels de travail par la direction nationale des médicaments.
Selon M. Bathily, l’une des difficultés décelées dans le système mis en place par le ministre de la Santé est l’entendue de la compétence de la direction régionale de lutte contre le covd-19 de Bamako sur toute l’étendue du Mali. À la place des structures régionales du pays, regrette-t-il, c’est seulement la direction régionale de Bamako qui est compétente pour faire des prélèvements et des suivis des personnes supposées avoir le virus. Ce qui rend difficile, pour lui, l’enraiement du virus.
M.Bathily estime que le virus peut tuer la personne infectée de Kayes, Mopti, Sikasso, ou dans d’autres régions du pays avant que l’équipe de la direction régionale de Bamako arrive sur le terrain.
« La décentralisation est source de l’efficacité, la centralisation est parfois source d’inefficacité, de difficultés, et même d’échec. Dans les régions du Mali, il y a des directions de lutte contre le coronavirus dotées des médecins compétents et expérimentés qui peuvent s’occuper de prélèvements de sang, voire des suivis de personnes infectées. Pourquoi confier la tâche des médecins de ces régions à la direction régionale de Bamako ? Cela est quel type de coordination ? », s’interroge Ras Bath.
Et d’ajouter que le ministre doit bien coordonner les choses, créant un cadre faisant en sorte que les uns puissent contribuer au renforcement des autres. Pour la réussite du combat anti covid-19, le porte-parole du CDR estime que la gestion des régions du Mali doit être confiée aux directions régionales qui exprimeront leurs besoins en matériels à travers la direction régionale de Bamako.
Il trouve que c’est en tenant compte des besoins régionaux que la direction nationale présentera au ministère de la Santé l’ensemble des besoins du pays en termes d’équipements et de produits. Pour Bath, la compétence du coordinateur national de lutte contre le coronavirus ne se limite pas au volet sanitaire, la sécurité fait aussi partie. Pour le couvre-feu de Bamako, dit-il, les policiers, Gardes, et les gendarmes doivent normalement être mis à la disposition d’Akory Ag Iknane. Ce dernier doit gérer les problèmes de masques, gels et autre besoin sanitaire des agents qui maintiennent le couvre-feu. Pour les régions, annonce-t-il, les directeurs régionaux de lutte contre le covid-19 doivent répondre aux besoins de gels, masques, des agents de couvre-feu.
Se prononçant sur le cas de l’honorable Hady Niangadou, testé positif au covid-19, le chroniqueur sensibilise la population et invite les personnes qui ont été en contact avec Niangadou à se soumettre au test ou à observer la quarantaine pour éviter la contagion des autres citoyens. Il précise qu’une personne infectée peut transmettre le virus à 406 personnes par mois. À l’entendre, aucune personne n’est présentement au palais de Sports pour observer la quarantaine. « Toutes les personnes contacts identifiées se trouvent en quarantaine chez elles », a-t-il martelé, déplorant la gestion de la restauration des malades, voire le choix des hôtels pour la quarantaine par le ministre Michel. Un pouvoir qui, pour lui, relève de la compétence du coordinateur Akory. Au lieu de louer les hôtels, Mohamed Youssouf estime que les bâtiments publics disponibles peuvent être mis à la disposition des autorités sanitaires. De la gestion du coronavirus, dit-il, certaines personnes sont en train de faire « le corona business ». Ce qui l’amène à dire : « Cette gestion du covid-19 est indicatrice de l’incompétence, de l’irresponsabilité, et de l’inefficacité du premier responsable de la Santé, Michel Hamala Sidibé ».
Mamadou Diarra
Source : LE PAYS