Prorogation du mandat des députés jusqu’au 02 mai 2020 : Des partis politiques, mouvements et personnalités individuelles désapprouvent
Les réactions poussent comme des champignons depuis l’annonce, par le communiqué du Conseil des ministres extraordinaire du vendredi 07 juin 2019, de la prorogation du mandat des députés jusqu’au 02 mai 2020. Des partis politiques, mouvements, personnalités individuelles se sont opposés sur la toile à cette décision du gouvernement, tout en criant à la violation de la loi fondamentale malienne, la constitution de 1992.
Après des semaines de doute et des inquiétudes des Maliens sur la légitimité de l’Assemblée nationale, le gouvernement de Dr Boubou Cissé a mis fin aux supputations tout en annonçant la prorogation à nouveau du mandat des députés jusqu’au 02 mai 2020. C’est en tout cas ce que nous avons appris du communiqué du conseil de ministres extraordinaires du vendredi 07 juin 2019. Comme explication à cette 2è prorogation du mandat des députés, le gouvernement malien écrit : « L’évaluation de la situation politique et sécuritaire du pays révèle la persistance des difficultés et contraintes qui ne permettent pas la tenue d’élections législatives régulières et transparentes ». Pour l’équipe du Dr Boubou Cissé, les conditions optimales à la bonne organisation des élections législatives ne sont pas, pour le moment, réunies.
Le parti ADP-Maliba s’oppose à cette 2e prorogation du mandat des députés
Le parti de l’homme d’affaires Aliou Diallo n’a pas changé sa position concernant cette décision du gouvernement qu’il qualifie « de violation grave de la constitution » malienne. « Si nous acceptons une nouvelle prorogation des mandats, nous devrons nous attendre à tout », lit-on sur la page Facebook de Cheick Oumar Diallo, président de jeunes de l’ADP-Maliba.
Pour COD, le paradoxe est que le gouvernement qui proroge le mandat des députés à cause de l’insécurité veut coûte que coûte réviser la constitution malgré cette insécurité. « Au final, à quoi serviront la politique et les partis si c’est un même groupe de 2013 qui se maintient au pouvoir sans élection et qui tient en otage tout le pays sous le prétexte d’une insécurité qui n’a pourtant pas empêché la tenue en 2018 de la présidentielle « sur tout le territoire» ? », s’interroge celui qui est affectueusement appelé COD par ses proches.
Le parti de Oumar Mariko proteste contre la décision du gouvernement
Comme l’ADP-Maliba, le SADI de Oumar Mariko s’oppose à la décision de la prorogation du mandat des députés. À travers un de ses membres influents, Dr Allaye Bocoum, le SADI appelle les Maliens à empêcher cette prorogation. «Si le peuple malien est prêt, dans sa majorité, SADI l’attend, pour qu’ensemble, on puisse empêcher ce déni de démocratie, qu’est cette prorogation du mandat des députés », lit-on sur sa page Facebook. Il estime que cette prorogation est « illégitime, illégale, ignoble et inutile ». Dr Allaye va plus loin en déclarant : « Ces gens ne sont pas élus, ils sont « décrétés » pour dilapider 16 à 18 milliards de CFA et faire le boulot du système ».
Pour ce parti d’opposition, à défaut des élections législatives, il faut créer une Assemblée Constituante qui est, selon lui, moins chère et plus démocratique.
Le Parti ADEPM dénonce et s’oppose à cette « pratique antidémocratique et anticonstitutionnelle de prendre en otage » le Mali.
Après le SADI et l’ADP-Mali, le parti ADEPM sort de son silence et dénonce la décision du gouvernement malien. Frustré, le parti tient le gouvernement responsable de la violation de la constitution malienne par son « incapacité » à organiser les législatives dans les délais constitutionnels. « Le Parti ADEPM a alerté l’opinion nationale et internationale que cet accord politique de gouvernance est une insulte, une prise en otage du peuple malien, une garantie politique pour la prolongation du mandat des députés, un partage de responsabilité pour imposer la révision constitutionnelle dans le seul et unique but d’appliquer l’accord d’Alger de partition du MALI pour faire plaisir à la France et aux groupes armés », écrit-il dans son communiqué publié le samedi dernier.
Beaucoup d’autres partis comme le FAD de Nouhoum Sarr se sont aussi opposés à cette seconde prorogation du mandat des députés.
Le Mouvement Trop c’est trop s’oppose à la décision et promet de se battre pour le respect de la constitution
Le Mouvement Trop c’est trop, un des principaux acteurs de la plateforme AN TE A BANNA en 2017, dit niet à cette prorogation du mandat des députés. Pour ce mouvement, la prorogation du mandat des députés, à travers une loi organique, n’est ni plus ni moins qu’une révision de la Constitution en dehors de toutes les procédures prévues à cet effet. « Or, ni le Gouvernement ni l’Assemblée nationale, encore moins la Cour constitutionnelle n’ont le droit de revenir sur une disposition constitutionnelle en dehors de la procédure prévue par elle à cet effet », lit-on dans son communiqué du 07 juin. Comme COD de l’ADP-Maliba, le Mouvement Trop c’est trop s’interroge sur la cohérence de l’action gouvernementale quand celui-ci, incapable d’organiser des élections législatives, veut organiser un référendum. «Dans un tel contexte, le Mouvement se réserve le droit, d’engager, dans les limites légales, toutes actions utiles et nécessaires afin de garantir le respect de la constitution par tous les Maliens y compris ceux qui sont censés en être les garants », apprend-on de son communiqué.
Me Mamadou Ismaël Konaté se prononce sur le sujet
L’ancien ministre de la Justice d’IBK n’a pas gardé son silence sur cette question brulante du pays. En tant qu’expert, il dénonce lui aussi sur son compte tweeter, la violation des lois maliennes par le régime en place. « La pire violation en matière de démocratie : un régime prend en otage l’Etat et ses institutions, pour gouverner, pour bien et contre le gré de tous, de l’intérêt général et de la collectivité tout entière. Ni plus ni moins qu’une haute trahison et un parjure », a-t-il dit.
En tout cas, même si le gouvernement arrive à le faire, cette prorogation du mandat des députés jusqu’au 02 mai 2020 n’est pas partagée par la majorité des Maliens.
Boureima Guindo
Source : LE PAYS