InterviewLégislatives 2020

Dora dit Cheick Diarra, candidat du parti SADI dans la circonscription électorale de Kati : «Au lieu du véritable monde du travail, c’est plutôt le patronat qui est représenté à l’Assemblée nationale du Mali»

En cette période électorale, nous avons été à la rencontre de Dora dit Cheick Diarra, candidat du parti Solidarité Africaine pour la Démocratie et l’Indépendance (SADI) dans le cercle de Kati. Motif : recueillir l’avis du porte-étendard du parti de l’opposant Oumar Mariko via une interview. C’était le lundi 16 mars 2020 au siège du parti sis à Djélibougou.

Le Pays : Qui est Dora Diarra ?

Dora dit Cheick Diarra : Je suis professeur de philosophie au lycée Fily Dabo Sissoko, secrétaire général de la coordination SADI de Kati et premier secrétaire à l’organisation du bureau politique du parti. Né à Nossombougou, dans le cercle de Kolokani, j’ai fait mes premiers pas à l’école fondamentale de Banconi avant d’être orienté, après le DEF, au lycée Bouyagui annexe, devenu lycée Bilali Sissoko. Après l’obtention du bac, je me suis inscrit à la Faculté des Langues, Lettres, Arts et Sciences Humaines (FLASH) en filière Philosophie. Après l’Université, j’ai eu le concours d’entrée à l’École Normale Supérieure (Ensup), pour sortir comme professeur de philosophie. Je suis candidat à la députation en cours.

Pourquoi avez-vous décidé d’être candidat à Kati ?

SADI est un parti différent des autres. Je n’ai pas demandé à être candidat, j’ai été choisi par ma commune en mon absence, et retenu candidat parmi ceux qui ont été proposés par la commission du bureau de coordination de Kati.

J’ai accepté d’être candidat pour porter plus haut et plus fort la lutte et le combat du parti à l’Hémicycle. Un combat qui se mène tous les jours par les responsables du SADI en faveur des masses laborieuses, des travailleurs. Nous faisons partie de ceux qui se battent pour les travailleurs.

Dans ce monde, il existe une lutte farouche entre le travail et le capital. Nous avons choisi de soutenir le travail contre l’exploitation capitaliste. Nous vivons dans un pays démocratique et non dans la dictature où le chef de l’État dicte tout aux autres. Ce qui veut dire que tout se passe selon la loi, d’où l’importance de l’Assemblée nationale que nous cherchons. Elle est une institution où le jeu politique, voire les combats idéologiques et politiques se jouent.

À Kati, il y a sept (7) députés, mais posez-vous la question si la population les connait. On a l’impression qu’ils n’existent pas. Ils n’étaient ni connus ni vus par la population qui ne les voit qu’à la veille des élections. Après cela, ils disparaissent. Ceux qu’on connaît parmi eux sont engagés dans la spoliation des terres servant de concessions pour des citoyens.

C’est vu tous ces contextes que nous avons décidé d’être candidat pour porter la voix des habitants de Kati et défendre leurs intérêts.

Vous avez décidé d’aller en alliance avec le RpDM et le PCR dans votre circonscription électorale. Pourquoi le choix de ces deux partis politiques ?

Le RpDM de Cheick Modibo Diarra est un parti respecté à Kati et dans le pays. C’est pourquoi nous avons accepté de discuter avec lui. Mais nous avons dit que nous n’allons pas discuter des alliances sur la base d’une question d’argent ou de qui peut payer mieux. Pour nous, l’élection n’est pas une question d’argent. On aurait pu être dans un autre pays, les électeurs auraient payé nos frais de campagne. Barack Obama a été élu sur l’argent du contribuable américain, donc du vrai peuple.

Nous disons que nous n’allons pas parler d’argent, mais nous allons parler avec des partis politiques composés de candidats crédibles et sérieusement engagés dans les combats pour l’intérêt du peuple. Bref, notre alliance est scellée sur la base de l’honneur, de l’intégrité, et de l’engagement politique. Ce qui fait que le SADI, le RpDM et le PCR ont unifié leurs forces.

N’était-il pas possible d’aller tout seul à ces élections ou vous ne vous faites pas confiance à Kati ?

Oui, aller seul ou avec d’autres, était un débat. À un moment, on avait aligné les sept candidats pour le parti SADI. Mais quand tu as la possibilité de conjuguer les efforts avec d’autres, il faut le faire.

En matière d’élection, c’est plutôt bien de fédérer les forces. Les élections, ce ne sont pas des mathématiques. Si c’était le cas, elles allaient être simples. Les électeurs sont difficilement catégorisables.

Nous étions décidés d’aller seul. Mais être aussi avec des gens nous permettra encore de conjuguer les intelligences et les stratégies. Ça nous permet aussi de mieux garantir la victoire. C’est ce qui nous a motivés, sinon la coordination SADI avait décidé à ce qu’on aille seul à ces élections. On pouvait aller seul, mais ensemble, on arrive aussi facilement.

Ouvertes depuis le 8 mars, les campagnes se poursuivent. Qu’est-ce que vous êtes en train de proposer à vos électeurs comme engagements à accomplir, une fois élu député ?

Nous disons qu’il nous faut une Assemblée nationale populaire à partir du 29 mars prochain. Dans notre pays, les couches les plus nombreuses sont les paysans, les artisans, les agriculteurs, les ouvriers, les transporteurs… le véritable monde du travail. Mais hélas ! Au lieu du véritable monde du travail, c’est plutôt le patronat qui est représenté à l’Assemblée nationale du Mali. Cela s’explique par le fait que le jeu démocratique est devenu une histoire d’argent. C’est aussi dû au fait que le véritable monde du travail ne s’occupe pas du paysage politique.

Ne s’occupant pas de la politique, le monde du travail a laissé la place à des affairistes venir à l’Hémicycle pour la promotion de leurs affaires. Ces affairistes préfèrent l’agro-business à l’agriculture familiale. Ils préfèrent l’importation à la production nationale. C’est pourquoi ils n’obligent pas l’État à donner des marchés à des nationaux. Ce qui fait que les tables, fauteuils, et même des simples rideaux des institutions du Mali ne sont pas façonnés par les producteurs du pays. Ils viennent des pays étrangers.

Il nous faut une véritable armée nationale, nous sommes contre toute intervention étrangère dans le pays. Nous pensons qu’il faut trouver une solution définitive à cette crise sécuritaire par des législations. Il nous faut la cohésion nationale. Aujourd’hui, il faut une solution à la crise scolaire. Ceux qui doivent la résoudre ne sont pas concernés, puisqu’ils n’ont pas leurs enfants dans les écoles publiques. Il nous faut une loi obligeant les ministres et différents décideurs à inscrire leurs enfants dans des écoles publiques.

Les milliards qui sont investis dans des évacuations sanitaires, pourquoi ne pas prendre une loi obligeant le président de la République, les ministres et cadres à se soigner dans le pays ? C’est une honte que ce soit seulement les présidents et cadres africains qui partent ailleurs pour se faire soigner. Personne n’a vu un président français ou américain venir se soigner en Afrique. Le Maroc est devenu exemplaire parce que le roi a décidé que lui et ses ministres ne vont pas ailleurs pour se faire soigner. Nous devons aussi protéger les terres paysannes, spoliées tous les jours par les détenteurs de titre foncier.

Selon vous, qu’est-ce qu’il y a lieu de changer à l’Assemblée nationale de nos jours ?

Aujourd’hui, je pense qu’il y a lieu de changer le mode auquel se constituent les groupes parlementaires. Auparavant, il fallait avoir 5 élus pour la constitution du groupe parlementaire. Maintenant, ils sont allés à 10 députés. Quand tu n’as pas de groupe, tu n’as pas de bureau à l’Hémicycle, et tu as moins de temps pour intervenir sur des questions à l’Assemblée nationale. Ce qui fait que le jeu majoritaire prime sur le véritable débat démocratique. À l’Assemblée, il doit avoir des tendances : extrême droite, la gauche, le centre. À l’Assemblée, les élus doivent être orientés par rapport à leur ligne politique et idéologique. Le règlement intérieur doit respecter toutes les sensibilités. Je dirais aussi que l’Assemblée nationale qui oblige les élus à la restitution doit aussi les obliger à faire des consultations avant la prise des lois.

Un dernier mot ?

Ce que je vois sur le terrain me rassure qu’on peut passer dès le premier tour. Il y a 500 000 électeurs qui doivent voter à Kati. Ces gens ont la conscience éveillée, les candidats corrupteurs ne peuvent pas les acheter tous. Ce sont les électeurs du parti SADI. Ils se manifestent pour qu’on ne puisse pas aller au deuxième tour. À ces électeurs, je lance un appel, leur disant que nous n’avons pas envie d’aller au deuxième tour, nous voulons gagner dès le premier tour.

Réalisée par Mamadou Diarra

Source : LE PAYS

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